Prédication du 14 janvier 2024 : Moïse sauvé des eaux

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Prédication du 14 janvier 2024 : Moïse sauvé des eaux

Lectures :
Moïse sauvé des eauxExode 2 1 à 10
Le baptême de Jésus – Mathieu 3 13 à 17
La Transfiguration – Mathieu 17 1 à 9

Qui n’a pas le souvenir de ce récit, de ce souvenir d’enfance de jeune catéchumène. Je m’en souviens comme si cela était hier, de cette illustration d’un livre racontant les belles histoires bibliques. Moïse dans un couffin, tel un berceau, balancé, emmené par le courant, au milieu des roseaux lesquels rassurent, une femme qui semble le retenir dans le mouvement de sa main, alors qu’il s’éloigne déjà de la berge.  Une illustration colorée avec des tons apaisants et rassurants malgré la dureté de la scène et les menaces bien réelles. Ne voit-on pas là, l’abandon d’un nourrisson sa fragilité  l’inconnu, déjà des interrogation sur l’origine, la filiation , la mère biologique et la mère adoptive, quelle identité, que transmettre ?

N’y a-t-il pas une sorte de lien avec la nativité dont la résonnance est certes infiniment plus douce joyeuse rassurante d’un Jésus emmailloté, entre Marie et Joseph ? Mais le mystère ici est antérieur, un point commun sans doute le « n’ayez pas peur » de la Transfiguration qui réunira Jésus et Moïse.

Et puis il y a l’eau, l’importance de l’eau dans ces régions arides, l’eau qui permet les cultures, qui purifie, qui donne la vie. Le Nil, le Jourdain, les lacs, les pécheurs et leurs barques, la tempête apaisée.

Correspondances, résonnances, similitudes et ruptures vont être évoquées, et pas seulement entre le Moïse de la Torah et le Christ, mais aussi la place incontestée de Moïse dans le Coran , où son nom est cité dans un tiers des sourates.

Mais Moïse : quelle vie ! c’est une vie incroyable, avec aussi quelques moments de doute, voire de faiblesses bien humaines et compréhensibles, mais avant tout une obéissance et une confiance en Dieu dont il est le Prophète annoncer la parole de Dieu, lui le prophète.  Ainsi devant le buisson ardent, Moïse n’est pas disposé à se laisser convaincre, d’accepter la mission que lui ordonne Dieu exigeant qu’il fasse sortir les Israélites d’Egypte. Il faudra que Dieu transforme le bâton de Moïse en serpent pour que ce dernier accepte cette mission si périlleuse. Moïse déclarera qu’il a des difficultés de langage pour proclamer la parole divine, et c’est son frère Aaron qui sera désigné par Dieu pour porter la parole transmise à son frère.    Avec les dix commandements Moïse sera le législateur, le moralisateur.                                                                                   Jésus en ajoutant, les deux commandements « nouveaux » opère une rupture radicale et pourtant il s’inscrit aussi dans la fidélité de Moïse, de même que son enseignement bouleverse la morale traditionnelle et l’ordre social. Mais Jésus est le Verbe, l’incarnation du Verbe il n’ est pas simple prophète, porte-parole de Dieu.

Mohammed, ne sera ni l’incarnation du verbe, ni un sauveur, mais un prophète, et le coran ne comportera pas de récits racontés par les prophètes, mais exclusivement la transcription littérale de la parole d’Allah.                                    Mais revenons à Moïse, bébé sauvé des eaux… Quelle énergie, quelle longévité justifiant la place tutélaire qu’il représente pour les trois monothéismes !                                                                    Les plaies d’Egypte, le passage de la mer Rouge, les déserts, les montagnes avec le Sinaï et les Tables de la loi, le Veau d’or.

Moïse archétype du Prophète de l’ancien testament, mais comme il est dit plus haut tel Mohammed, il n’est pas un Sauveur, il n’est pas le Verbe.

Moïse et Mohammed, sont tous les deux des médiateurs entre Dieu et son peuple, ils sont législateurs, moralisateurs, chefs politiques et militaires.

Ceci similitudes et convergences étant posées, lesquelles expliquent comme dit plus haut pourquoi Moïse est autant cité dans les sourates, il convient de se laisser maintenant interpeller par la Transfiguration qui met ensemble en perspective Elie, Moïse et Jésus, accompagnés de trois apôtres, Pierre, Jacques et Jean.

Elie rêve d’un Dieu fort et puissant, réduisant ses adversaires, après avoir de sa propre initiative provoqué et égorgé les adeptes de Baal, il doit fuir mais il rencontrera le vrai Dieu, lorsqu’il sera refugié dans une caverne. Et Dieu n’est ni la foudre, ni le tremblement de terre, ni l’inondation, comme les Dieux de l’antiquité grecque, mais il est un souffle léger, c’est à dire une parole, le verbe qu’incarnera Jésus.

Si Jésus n’a pas descendu le Nil sauveur pour le bébé qu’est Moïse, Jésus a été baptisé dans le Jourdain, cette association, peut sembler digressive mais c’est malgré tout un lien qui unit à travers la symbolique de l’eau des deux fleuves Moïse et Jésus, mais surtout Moïse est présent en tant qu’il représente le plus important, le plus reconnu des prophètes de la tradition vétérotestamentaire.

Ainsi Elie a rencontré Dieu, tel un souffle, lequel est parole, quant à Moïse il est le Prophète par excellence. Ces deux grands personnages représentent à eux deux les prophètes et la loi.

Jésus accomplira pour les chrétiens ce qui est déjà en germe, et quel germe, chez Elie et Moïse. Fils de Dieu, il est l’incarnation du Verbe, par le mystère de la croix, il est notre sauveur.                 Jésus préserve l’héritage de l’ancien testament, reprend à son compte le passé, mais il provoque aussi une rupture, et annonce une promesse, celle de la résurrection.

Voila pourquoi, la transfiguration occupe une place singulière et essentielle au sens le plus fort. La présence des disciples qui représente l’actualité de l’évangile, lesquels pourront attester de ce qu’ils auront vu et vécu.

Le dialogue de Jésus avec les deux grands personnages, Elie pour le souffle de Dieu, et Moïse pour les tables de la loi, structurantes et morales, prennent toute leur place.  

La Transfiguration est la version latine de la métamorphose, aussi lorsque Jésus arrive au sommet de cette haute montagne où il rencontre Elie et Moïse, son visage resplendit comme le soleil, ses vêtements deviennent blancs, Moïse et Elie commencent à s’entretenir avec lui.                                        Pierre propose de planter trois tentes. Ceci signifie que Pierre imagine que la situation si particulière va durer. A ce moment une nuée apparait, telle la nuée qui enveloppait les israélites lors de leur traversée du désert, et une voix dit : Celui-ci est mon fils bien aimé, en qui j’ai mis toute mon affection, écoutez-le.

Les disciples sont effrayés, Jésus déclare :  n’ayez pas peur, et aussi tôt, Elie et Moïse ont disparu…et Jésus descend aussitôt avec ses disciples de la montagne, c’est le retour à la réalité, la rencontre n’avait pas de raison de durer.  Tandis qu’ils descendent, Jésus leur demande ne parler à personne de cette vision jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité des morts.

Remarquons tout d’abord qu’avec le baptême de Jésus il s’agit du seul témoignage rapporté ou la voix de Dieu se fait entendre venant du ciel. Pour le baptême : tu es mon fils bien aimé, il m’a plu de te choisir, ici, Celui-ci est mon fils bien aimé.  De nouveau cette constation, permet ce lien entre le Nil protecteur de Moïse bébé et le Jourdain pour le baptême de Jésus. Enfin pour la promulgation si importante des tables de la loi, Moïse est au mont Sinaï, ici pour l’annonce de la résurrection, manifestation fondamentale de la rupture avec le passé mais à la fois dans la continuité des évènements et annonces relatés dans l’ancien testament l’annonce de la résurrection de Jésus, sauveur, Jésus est également sur une montagne, peut être à nouveau le mont Sinaï.

Ce récit, peut sembler étonnant dans la mesure où Jésus semble ne s’intéresser qu’à la discussion avec Elie et Moïse, et il laisse dans un premier temps de côté les disciples, il ne leur parlera à nouveau que lors de la descente de la montagne pour leur donner des ordres. De même, certes le «  n’ayez pas peur », bienveillant et fraternel a été prononcé  mais les disciples sont un peu perdus comme lorsqu’ ils proposent de monter trois tentes.

En définitive, ce moment assez particulier, incroyable, nous apprend la nécessité de savoir prendre le temps, pour prier, accepter notre conversion. Jésus ne veut pas être pris pour ce qu’il n’est pas, tout autre aurait pu souhaiter que la scène soit racontée pour sa propre glorification immédiate. Le temps est un facteur important de l’enseignement de Jésus, il s’inscrit dans une certaine durée,

L’annonce de la gloire de Jésus sera révélée au moment de la résurrection.

C’est en liant réflexions, souvenirs, rencontres, correspondance que l’enseignement de Jésus nous aide à entrer dans le mystère de la croix et de la résurrection, quel que soit la compréhension et même l’acceptation qui se cache en notre spiritualité personnelle.

Et pour conclure et élargir cette méditation associant Moïse et Jésus, terminons par le début du psaume 90 dont l’écriture est attribuée par la tradition a Moïse :

Seigneur tu as été pour nous un refuge de génération en génération.